Stop aux Barbies !

Ca y'est, j'en pouvais plus. Du rose partouuuuut c'est pas possible ! Un de ces jours je repeindrai tout en noir, y compris les Barbies qui se baladaient dans l'école.

Le ciel était d'un bleu éclatant, exactement comme je les aimais pas. Le soleil brillait, les oiseaux chantaient, et bla bla bla. Zoey serait exactement du même avis que moi... si elle était à côté de moi en ce moment. Ca faisait des jours que je la voyais plus, et à vrai dire elle me manquait. C'était la première fois que ça arrivait, d'habitude les gens m'énervaient. Il faut dire que j'avais trouvé ma Jum' !

Je me baladais d'un air nonchalant dans le parc, en secouant la tête désespérément à chaque Barbie que je croisais. Pour ma part, je portais une simple robe noire à dentelles et dos nus. Mes pieds étaient chaussés d'une paire de ballerines noires, et un collier en argent en forme de coeur brisé pendait à mon cou pâle. Aucun maquillage ce matin, mes grands yeux verts étaient au naturel.

Telle était ma vie : lost in a stupid Barbie world.

Je marchais tranquillement, quand on me rentra en plein dedans. Je tournais la tête vers la personne qui m'avait bousculée et vit un jeune homme aux oreilles de chat et aux cheveux bleus. Pour une fois que y'avait pas du rose !

<< - Vous allez bien ? Je suis confus, je ne regardais pas devant moi. Vous n'êtes pas blessé ? >>

Il plaisantait ? ''Vous'' ? Je fais si vieille que ça ? Qu'est-ce que ce sera dans quelques années...

<< Euh oui, t'inquiète pas. Mais pourquoi tu me vouvoies ? J'ai pas 30 ans, enfin je crois. Moi c'est Chelsea Allen, mais tu peux m'appeler Chel's, répondis-je en lui tendant une main. >>

Calliopë se renfrogna un peu. En trois rencontres à l'école c'était la troisième fois qu'une personne lui faisait une remarque sur son langage. Il n'y avait donc personne pour respecter le protocole ou l'étiquette ici ?
- Pardon, s'excusa-t-il. C'est une tradition. Là d'où je viens on m'aurait fouetté pour avoir tutoyer quelqu'un. Je suppose que les habitudes ont la vie dure.
Il frissonna rien qu'au souvenir de situations pas très agréables qui avait vécu alors qu'il était encore tout petit.
- On me prénomme Calliopë, pour te servir. (Il lui fit un sourire timide.) Mais je suppose que tu peux m'appeler Calli.
Il posa légèrement ses lèvres sur la main qu'elle lui tendait.

Il s'excusa :

<< - Pardon. C'est une tradition. Là d'où je viens on m'aurait fouetté pour avoir tutoyer quelqu'un. Je suppose que les habitudes ont la vie dure. >>

Je ressens parfois les émotions des gens, et je compris qu'il cachait des souvenirs douloureux.

<< - On me prénomme Calliopë, reprit-il avec un sourire timide, pour te servir. Mais je suppose que tu peux m'appeler Calli. >>

Je crû qu'il allait simplement me serrer la main ou un truc du genre, mais non : il posa ses lèvres sur ma main. Ouah, la classe ! Ca changeait de tous ces mecs qui se la pétait en crachant par terre, répugnant.
Je lui adressai un de mes rares sourires et répondit :

<< Bienvenue à toi, Calli ! Tu sais déjà où est ton dortoir, j'imagine ? A première vue, tu dois être topaze. Je me trompe ? >>

- Bienvenue à toi, Calli ! Tu sais déjà où est ton dortoir, j'imagine ? A première vue, tu dois être topaze. Je me trompe ? répondit la jeune fille.
Elle avait l'oeil celle-là.
- Euh c'est tout à fait exact. Comme l'as-tu deviné ? Ce n'est pas comme si c'était écrit en rouge sur mon front, si ? Tu es topaze aussi ou bien... ?
Encore une fois Calliopë mesurait les limites de sa conversation. Il ne savait ni comment réagir ni quoi dire en face de Chelsea par peur de commettre un impair. Etait-elle une princesse aussi ? Depuis qu'il était là il n'avait croisé que ça.

<< - Euh c'est tout à fait exact. Comme l'as-tu deviné ? Ce n'est pas comme si c'était écrit en rouge sur mon front, si ? Tu es topaze aussi ou bien... ?

- Je cerne facilement le caractère des gens ; c'est comme une sorte de... de don. Je suis rubis moi, vu mon caractère plutôt rebelle... >>

Je soulignai cette dernière phrase par un rire.

- Je cerne facilement le caractère des gens ; c'est comme une sorte de... de don. Je suis rubis moi, vu mon caractère plutôt rebelle...
Un pouvoir ? Oui, il n'était pas le seul à en détenir un, il le savait bien. Mais celui de "sentir les émotions" des gens était particulièrement intéressant. Avoir un tel don lui aurait permis de se sortir de situations bien désagréables.
- Tu es une rebelle ? Je ne comprends pas très bien ? Tu veux dire que tu enfreins volontairement la loi ?
C'était bien la première fois que quelqu'un le revendiquait haut et fort devant lui.

<< - Tu es une rebelle ? Je ne comprends pas très bien ? Tu veux dire que tu enfreins volontairement la loi ?

- Si tu appelles ''la loi'' le règlement de cette école, on va dire oui ! Mais bon, j'y suis pour rien, je suis comme ça. Et pouvoir voir les esprits n'arrange rien, crois-moi ! >>

Étonnant ce garçon. Il parlait pas comme tout le monde - comme personne en fait.

Les poils de Calliopë se dressèrent sur sa nuque. Oh mon dieu ! Il était en présence d'une dangereuse psychopathe qui n'hésitait pas à faire sauter le règlement de l'école comme si de rien était ! Si jamais on la voyait en sa compagnie il allait s'attirer de graves problèmes !
Le jeune garçon était déjà paniqué mais lorsqu'elle lui dit qu'elle voyait en plus des esprits, il faillit faire une attaque.
- Des... des.. des fantômes ? ICI ? Je crois qu'il va falloir que je m'asseye quelque part...
Cherchant un banc des yeux, il tituba jusqu'au plus proche et s'écroula dessus dans une froissement de jupe.
La fille de sa maîtresse était une nécromancienne qui n'hésitait pas à transformer les êtres vivants en zombie. Rien que le fait d'évoquer des fantômes lui foutait une frousse pas possible.
- Dé... Désolé. C'est juste que je trouve les esprits terrifiants...

Il n'avait pas l'air très à l'aise lorsque j'ai énoncé le fait que je ne respectais parfois pas le règlement. Lorsque j'enchaînais avec mon histoire de pouvoir voir les esprits, il devint d'une pâleur inquiétante.

<< - Des... des.. des fantômes ? ICI ? Je crois qu'il va falloir que je m'asseye quelque part... >>

Il marcha avec difficulté jusqu'au banc le plus proche et s'y écroula. Le pauvre, il n'avait vraiment pas l'air bien. J'aurai du me taire...

<< - Dé... Désolé. C'est juste que je trouve les esprits terrifiants...

- Ils ne le sont pas tous tu sais, dis-je avec un sourire en m'asseyant à côté de lui. C'est sûr que c'est flippant au début, quand t'es pas habitué, mais ils sont plutôt sympas, pour un peu que tu les connaisses. >>

Je posais une main sur son bras d'un air de compassion, et regretta ce geste aussitôt. Une vision allait venir, je le sentais : ma tête tournait, je commençais à trembler légèrement. Pas maintenant...
Tout alla très vite :

Un accouchement, la mort d'une mère, la vie épouvantable d'un garçon en parallèle avec celle d'une princesse riche, heureuse, et capricieuse, des sols lavés, des rideaux époussetés...

Je haletais, comme à chaque fois. Je détestais ce ''don'', je n'aimais pas voir le passé des gens...

- Ils ne le sont pas tous tu sais, dis-je avec un sourire en m'asseyant à côté de lui. C'est sûr que c'est flippant au début, quand t'es pas habitué, mais ils sont plutôt sympas, pour un peu que tu les connaisses.
Oh pour y être habitué, il y était habitué ! Ca faisait des années que les esprits pullulaient dans la maison de ses Maîtres. Il n'en avait jamais rencontré un de bienveillant. Tous étaient à la solde de la petite maîtresse. Et ils l'avaient tourmenté plus que son content. Non vraiment, les esprits rien ne lui ferait jamais aimé ça.
Pourtant Chelsea voulut le rassurer néanmoins en lui touchant gentiment le bras. Aussitôt Calliopë remarqua que quelque chose n'allait pas. C'était son tour à elle d'afficher un air effaré doublé d'un teint grisâtre.
- Qu'y a-t-il ? On dirait que tu as vu un... fantôme.
La blague n'était pas très bonne ni très originale mais il espérait que cela remonterait un peu le moral de la jeune fille. Malgré ses airs de rebelle il sentait malgré tout une gentillesse émaner de son être. Et une grande tristesse aussi.

<< - Qu'y a-t-il ? On dirait que tu as vu un... fantôme. >>

La voix de Calliopë me ramena à la réalité.

<< -Non, c'est pas ça... C'est... Bon, très peu de gens le savent, mais je suis capable de voir le passé, et quelques fois le futur, de certaines personnes, lorsque cela est important. Et c'est ce qui s'est passé, là. Je déteste quand ça arrive. Désolée, je voulais pas m’immiscer dans tes souvenirs, c'est pas volontaire.
Mais ne parle à personne de cette sorte de pouvoir, s'il te plait. >>

Je me sentais mal après ce que j'avais vu... D'ordinaire, je ne laisse jamais transparaître mes émotions, mais là, je ne pouvais rien y faire.

<< - Ton secret est en sécurité avec moi, jamais je ne le trahirai. Tu peux me faire confiance. >>

Je savais que je pouvais lui faire confiance, malgré la boule au ventre qui persistait.
Il reprit :

<< - Je vais te montrer quelque chose que personne n'a encore jamais vu ! Attends je reviens.>>

Il ne me laissa pas le temps de répondre qu'il se leva et alla se planquer derrière un buisson. Mais qu'est-ce qu'il fabriquait ?
Un chat sortit du buisson. Il avait un pelage semblable aux cheveux de Calliopë... Euh c'était Calli ?
Il vint se coller à ma jambe et miaula.
Donc c'était bien lui ? Incroyable !
Je caressai doucement le sommet de sa tête en riant.

Calliopë se laissa caresser en ronronnant doucement. Personne ne l'avait vu sous sa forme de chat jusque-là. Il avait toujours fait très attention à ce que chacune de ses transformations se déroulent dans un endroit où il était absolument seul. Le fait qu'il ait révélé ce secret à Chel's démontrait qu'il avait confiance en la jeune fille malgré ce qu'elle lui avait dit de ses pouvoirs mystérieux.
Quand elle eut fini de le caresser, il retourna se cacher dans le buisson pour se transformer à nouveau et se rhabiller rapidement.
- Je pense que comme ça nous sommes quittes, dit-il en émergeant des fourrés. Si jamais l'un de nous trahi, l'autre peut aussi révéler son secret.

Je le caressai encore un peu, et le laissai retourner sous sa forme humaine.

<< - Je pense que comme ça nous sommes quittes, dit-il en sortant du buisson. Si jamais l'un de nous trahi, l'autre peut aussi révéler son secret.

- J'ose espérer que ça n'arrivera pas ! >>

Je me sentais un peu mieux, malgré le martèlement incessant dans ma tête.

- Je l'espère aussi. Il va donc falloir se faire mutuellement confiance !
Calliopë marcha jusqu'au banc et s'y rassit. Il avait complètement oublié cette histoire de fantôme. Il se mit à bailler.
- Pouah j'ai une de ces faims ! Me transformer me prend toujours beaucoup d'énergie. Tu veux quelque chose pour te remettre d'aplomb. Tu as l'air encore un peu pâle depuis tout à l'heure. Te mettre quelque chose dans le ventre te ferait beaucoup de bien aussi, je suppose.

<< - Je l'espère aussi. Il va donc falloir se faire mutuellement confiance ! >>

Calliopë me rejoignit sur le banc, et bailla.

<< - Pouah j'ai une de ces faims ! Me transformer me prend toujours beaucoup d'énergie. Tu veux quelque chose pour te remettre d'aplomb. Tu as l'air encore un peu pâle depuis tout à l'heure. Te mettre quelque chose dans le ventre te ferait beaucoup de bien aussi, je suppose.

- Je comprends, et maintenant que tu le dis, j'ai un p'tit creux. Tu proposes quoi ? >>

- Je comprends, et maintenant que tu le dis, j'ai un p'tit creux. Tu proposes quoi ?
Chelsea avait donc faim elle aussi. Calliopë réfléchit un moment. Ils étaient un peu loin des dortoirs pour aller faire la cuisine. Il avait vu un vendeur de glace à l'entrée du parc, c'était beaucoup plus proche.
- Une glace ça te dit ? demanda-t-il à la jeune fille.

Il réfléchit, puis demanda :

<< - Une glace ça te dit ?

- Parfait, répondis-je avec un léger sourire. >>

Je me levai du banc en bois au moment où une brise fit son apparition.

Ils se levèrent et une brise joua légèrement avec l’ourlet de la robe noire de Chel's. Elle était plutôt jolie d'ailleurs cette robe pensa Calliopë. Depuis qu'il était ici il n'avait vu que des gens avec de beaux vêtements. Des vêtements différents de ceux qu'il avait l'habitude de voir en tout cas. Il remarqua également le collier en forme de coeur brisé qui pendait autour du cou de la jeune fille. Il frissonna malgré lui. Avait-elle perdu quelqu'un ou était simplement un accessoire ? Il n'osa pas demander et préféra se concentrer sur la bonne glace qu'ils allaient bientôt déguster.
- Où donc passé le vendeur ? Il était là il y a quelques instants... grommela Calli pour lui-même.

Nous marchâmes donc jusqu'à l'endroit où Calli avait vu le vendeur de glaces. Cependant, personne en vue, à part des Barbies par dizaine. Elles étaient partout, ou quoi ?? L'invasion totale...

<< - Où donc passé le vendeur ? Il était là il y a quelques instants... marmonna Calli. >>

Je haussai les épaules en secouant la tête.

<< - Peut-être en a eu-t-il marre de toutes ces Barbies ? suggérai-je avec un demi-sourire. >>

- Peut-être en a eu-t-il marre de toutes ces Barbies ? déclara la jeune fille.
Calliopë dévisagea Chel's sans comprendre. Un petit sourire flottait au coin de ses lèvres. Elle venait sûrement de faire une blague mais il ne la comprenait visiblement pas.
- Heu ? Des Barbies ? Qu'est-ce que tu veux dire par là ?
Il pencha légèrement la tête sur le côté et fit bouger ses oreilles, perplexe.

<< - Heu ? Des Barbies ? Qu'est-ce que tu veux dire par là ? >>

Cal' me regardait d'un air perplexe. Apparemment, seulement Zoey et moi appelions les Barbies par... bah leur nom.
Ses oreilles bougèrent lorsqu'il pencha la tête sur le côté. Adorable !

<< - Bah les Barbies, tu sais ces filles qui s'habillent avec que du rose. Elles sont partout, c'est incroyable ! Il a du prendre peur ce pauvre vendeur... >>

Ma ''blague'', déjà pourrie au départ, était noyée au milieu des poupées. Fallait vraiment que j'apprenne à me taire, moi.